mercredi 22 août 2007

Panorama 17 - Monumental

…à peine quelques heures plus tard, je relevais la tête, mais seulement la tête, comme si je m’étais simplement étourdie de l’immobilité de mon corps – stoïque et fragile à la fois, imperturbable mais vulnérable – tendu entre le souffle de la lune et les rainures du plancher. Je rêvais. Sous le noir des draps qui recouvre la clarté de ces rêves interrompus trop vite, à peine quelques heures après avoir cherché l’obscurité – et ainsi depuis toujours, depuis la petite éternité, l’utopie dont je suis l’unique touriste – je me réveille, repoussant loin devant moi l’impression de n’avoir pas une minute dormi. Je me réveille. Sous le ciel lourd de midi, il fait encore nuit.

J’ai rêvé des rues toutes plates qui portent le nom de montagnes, j’ai rêvé des panneaux que l’on cache dans l’ombre des places en chantier, j’ai rêvé de ces balises perdues depuis que personne ne les voit plus, j’ai rêvé d’anges amoureux d’une tour de ferraille, de fièvres, de feux, j’ai rêvé de trois flambeaux rouges dans le ventre des nuages, j’ai rêvé que je levais mon verre à la prophétie des égarés, des sans bagages, des sans visages, des sans soucis. Authentique et rêvé. Maintenant, me voilà à la table d’un orage sans pluie. Absurde et incarné. Je veux juste ouvrir les yeux mais impossible car … le crie …. Je veux juste recueillir à nouveau le premier souffle de la journée mais impossible car … le crie … Je veux juste ne plus avoir à me réveiller. Impossible, je crie. Je crie derrière le bruit, devant, au-dedans de lui, je crie à m’en donner le tourni. Je crie à me rompre les poignets sur le bois des portes fermés. Je crie sur l’envers de la nuit. Tout le monde est réveillé. Tout le monde longe les routes que trace la surdité des journées solaires. Pas de lumière – moment creux, entre deux temps, entre deux songes, surface ronde et lunaire à la rencontre du ciel et de ma fenêtre grande ouverte, surface sourde et féconde à l’affût d’un bruit, à l’affût du passage de quelques petites gouttes ayant tout oublié du début de leur course. Immobile, neuve et rompue, je reste sans voix à la vue d’une autre journée qui étend sa fascinante évidence, immense, devant moi.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

d'une autre journée,
d'une même journée
monumentalement disposée entre soi et le jour

portes battantes