dimanche 29 juillet 2007

(l'autre) Panorama 12

Des nécessités sans voix et sans verve qu’entre sommeil et langueur, on nomme Wegweiser.

(Bas) pas à pas

Immobile. Je me répète, je me replie, je me reprends. Immobile sur ma voix dédoublée. On dit que la parole suit la dictée des gestes – gesetz – assis, béants sur leurs sieste . J’imagine le temps qui passe sur le même chemin, en remue un peu la terre pour y inscrire la trace de mes pas, puis chasser les bois effacés, les cabanes et les petits lits ensevelis sous la chute du verre mitraillé. Silence - l’aube des départs qui se lève sur une ombre fixe, vicée. Mon regard figé sur les mots en bribes brisant les derniers éclats de ma voix qui se traîne sous mes pas…

(Haut) petites pensées notées sur papiers à semer

La distance nous protège dès lors que nos désirs l’ont mesurée. On passe ainsi toutes les nuits dans la chaleur d’un horizon qui ne se couche jamais. On rêve. Les murs de la maison deviennent ces voiles limpides au travers desquels on trace la perspective de nos envies, à même le ciel… le ciel de nos soupirs, de nos désirs charnels … le ciel rendu à cette silhouette lunaire, à la proue d’un navire qui de jour, de nuit, de tout le temps qu’il nous a fallut pour le dessiner, n’a jamais bougé sa majesté. Maintenant, la volonté nous ébranle, la réalité des choses est une barque qui tangue, brise les prières, le calme de la mer et son rayon vert. L’ horizon qui fuit et, entre le jour et la nuit, la ville sur l’eau, la ville sous le poid des mots, la peur. Je dors. Les heures à compter, des petits papiers dans mes poings fermés.

(Centre) Gegenüber

A mon silence qui se cherche dans des pages que le temps n’a pas voulu garder, une fois, elle a murmuré qu’une histoire ne s’oublie pas et que certains se trompent sur l’empreinte de celles qui n’ont jamais existées. Elle a souri, m’a invitée à m’asseoir sur le fauteuil en face – entre elle et moi, un geste maladroit, dressé par l’attente, déçu par les intentions restées sans nom. J’ai ouvert les paumes pour me délester des obstacles, des détours, de l’échos des portes que du bout de la rue, de l’autre côté de la Karl-Marx Allee, on entend se fermer. Elle, la première à parler, à parler cette langue qui connaît un mot pour le lien aux choses, un autre pour celui aux gens… je raconte cette après midi blanche, quelques instants sourds, la chaleur épuisée des quais privés de la fraîcheur du vent sur l’eau. Je retrace le chemin de l’urgence, de l’attente, de la peur, de l’immobilité. Je passe l’envers du décor et fixe mon ombre entre un nom que mon regard semble avoir gravé dans la pierre qui l’a toujours porté et la fenêtre grande ouverte de l’appartement ivre des heures passées en tête à tête avec le plus vieux pont de la ville … un appartement vide de ses livres, devant lequel on vient, on retourne, on oublie et laisse tout ce qu’on s’est un jour contenté d’espérer, de l’autre côté du quai, le quai face à l’appartement, où c’est bien mon départ que ma dame attend

(Ailleurs)

horizons las

Non je ne me réveillerai pas - La fatigue du jour précédent sur l’euphorie de celui qui vient – on gratte à la porte mais non je ne me réveillerai pas – le jour que l’on entend de loin – peut importe les ombres qui grouillent sur les murs encore verts des premières lumières - qui s’approche aveugle par l’envers du chemin - je me tend puis retombe – et qui vous tient – à la blancheur du lit - vous retient – aux draps lourds – aux bras de la nuit – du sommeil qui s’effondre - vous lie les poings – silence - alors vient – de l’autre côté de la ville on part - vient – ici on tente de soutenir ces regards - le sommeil léger sur les portes closes – les rideaux chassés par le ciel - léger, léger – sur le réveil des départs précipités - le sommeil qu’ on ne parvient pas à dissiper – on court – qui nous innonde - sans relâche – puis nous laisse

dimanche 22 juillet 2007

panorama 12 - Vanishing Point

... j’ai bel et bien rêvé l’allée qui traverse le jardin jusqu’à l’entrée de la maison. Les assiettes en carton et les serviettes chiffonnées que le vent a éparpillé sur la pelouse, la porte grande ouverte à l’ombre du cerisier et le chandelier sur la table désservie du salon. Pleine lumière qui cerne la découpe de quatre cadres fixés au mur, au fond. Aquarelle et gestes cernés, la perspective unique de souvenirs anamorphosés, le dessin flasque et mobile pour seul point d’horizon. Et puis il y a cette porte qui s’entrouvre et se ferme, et dans sa grande respiration, tire toute la lumière de la maison sur l’ombre de la fille qui dort. Je vais, je viens. C’est bête, je me souviens.
Que chacun tire les enseignements des regards que nous ont adressés les sans voix, les sans noms, les ancêtres rêvés.

Elle, avec elle on bataissait des phrases comme on construit les maisons - du verre, crépusculaire, derrière lequel des gens viennent, vont. Il suffisait que j’ouvre le livre pour que les mots lui reviennent. Des notices, des petits papiers impossibles à replier et des dictionnaires en langue étrangère. Elle laisse les considérations branlantes et discordantes derrière les portes qu’elle referme derrière vous, elle lève le verre des horloges et avance, pas à pas, parlant, la voix haute et claire, de l’enfance de quatre portraits encore inanimés. Un peu plus loin, on finit sa nuit. Là, le ciel n’existe que par la fente des volets. La voix, la marche, les nécessités aveugles et la posésie lointaine des gens autour, partout, et toujours derrière le dos qui se tourne, derrière la nuque qui se tasse et s’éteind sur le grondement d’une voix retournant les tables de ceux qui ne la voient pas, qui ne veulent pas. Un peu plus loin, on défait son lit. Là, il paraît qu’un homme écrit… à côté de moi, quatre voix me demandent « quoi ? il écrit quoi ?». Pâle, je leur réponds « la place est vide ». Et Lui, dans sa course folle préfère les troncs secs et leur parole à poussière aux bras de son père. Son nom appartient au enfants qui ne reverront jamais la maison : Der Aufklärerisch. Je voudrais fermer les volets. Un peu plus loin, on s’est réveillé.
Elle, sourit de l’audace de ses enfants qui n’ont pas de mal à compter les piétinements de cet homme-là. Alors Elle sourit de cette proximitée que la nappe froissée à la place du chandelier, entre nous, rend encore plus ténue. On tourne, on ose pas, on écoute, on s’asseoit, on maintient la distance qui nous précipite dans ses bras. Puis (peut-être), on s’aperçoit qu’entre le verre, l’ombre des fées, de bambinss acrobates, des pantins du passés, qu’entre le miroir et son sourire blanc à brûler les pages ressassées, seul notre regard perciste. Il affûte, chevauche les mots et la grande marche des idées, puis une fois seul, dessine d’un même trait le contour des pierres qui guident la marche des égarés (l’architecte s’est enivré de leur musique - langues du monde entier ayant maudit le même sang courrant dans une tour de flamme et de fer - silencieux, sur le ciel de ses idées). Tout ne bouge que du dehors, que de derrière la verticale du verre et l’angle mort des coins de rue animées. Ici, on parle comme sur du bois peint, on pose la toile.