lundi 18 février 2008

Panorama 33 - Bliss


Brisée. Tomber - hurler à deux centimètres du sol - cogner un ventre aveugle et sourd - en trombe où la terre gronde - rompre le pas des égarés puis gratter, gratter jusqu’à la craie pour y enterrer le verre éparpillé – l’oubli - la main glacée - l’horizon ascéré – le front rendu au soleil de midi, pleurer - puis espérer, espérer que la pluie recouvre le dessin cruel et précis de la maison miroir – voyages en cours, voyages en cours, je n’ai jamais pris que le chemin de l’Eternel Retour

Prise dans le pli de tes bras – silence à l’ombre creuse d’un voyageur n’étant plus que la somme de ses pas - serrée dans les draps – « réveille toi mon amour » - mais c’est le vent de l’île lointaine et invincible qui secoue mes poings, mes reins, la journée de demain, la fatigue des nuits sans jours, l’euphorie des détours, le mât hissé au centre d’une terre où …, et l’oubli de son nom. Pendant que je compte encore et encore, le déclin de torrents assoiffés sur mes sens en transit, pendant que je sais que les doigts du marchand de sable ne peuvent rien contre leurs sabres, pendant que doucement je ne crois plus qu’aux faits, tu te fie à mon silence, ma nudité donnant à un corps cave l’illusion du vrai – un corps épuisé. Parfois pour accomplir le geste il faut rendre les armes – les armes de verres revenues à la terre - leur bris recouvert par ta voix longue, lente ruisselante dans le pli de mes draps, tendue jusqu’à moi – mais je ne dormais pas – mais je ne rêvais pas

Grise. Je me grise et me brise à la tendresse de mes soupirs, à la justesse de ces désirs – éphèmère, vorace et féroce, partie à la chasse au déli des patiences infinies, à l’éternité des dimanches au cimetière - éphémère hors frontière - je jouis - je crie encore – plus fort - aggripée à la gorge de ces nuits contre lesquelles je ne dormirais pas - ces nuits où j’ai désobéi

Prier. Le sel sur un ciel affolé – s’accrocher à ce qui va, ce qui est, ce qui sera toujours oublié – et puis enfin, parler - consentir à laisser là où elles seront vues les extases muettes puis répéter, te répéter que la magie de tes gestes ne peut rien contre moi – aucune histoire ne dira d’où je suis partie ce jour là – aucune histoire ne retracera le chemin de la maison miroir où je hurle en chantant, où j’ai froid souvent et d’où tu me regardes en dormant. Derrière le grand H d’une histoire avortée ne reste que l’horizon crypté de la Heimat dont j’ai le souvenir mais que je n’arrive plus à dire – en attendant je lève la main à la rencontre du vent venu de cette île invincible et lointaine, j’ouvre la paume pour défier le ciel et de la voix de celle qui n’était pas là je salue le cadavre du matin où je suis rentrée chez moi

2 commentaires:

Anonyme a dit…
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Anonyme a dit…

le jour sans cesse renait de son cadavre qu'on traîne, et qu'on porte, et qu'on agite pour faire croire à sa vie.